La guerre civile qui vient est déjà là de Damien Le Guay

« La guerre civile est d’abord culturelle avant d’être sanglante. Elle s’installe dans les cerveaux avant de se servir de Kalachnikov et de bombes. Et chez nous, depuis trente ans, elle s’est développée au sein même du monde culturel. »

Voilà un livre dont je ne sais si je dois le recommander pour la qualité de son analyse ou le mettre aux oubliettes tant en le fermant je n’ai qu’une seule envie, foncer chez Castorama pour trouver une corde solide et me pendre.

La politique de l’autruche est en ce qui me concerne la meilleure des thérapies car un excès de lucidité sans filtre a une fâcheuse tendance à me conduire dans un état de dépression avancée, dont je me demande longuement comment en sortir.

Ce qui est cependant fort amusant, c’est qu’à bien y réfléchir, en dehors de mes amis « sociaux » (comprendre, mes relations facebookiennes), je ne fréquente dans la « vraie » vie que de très peu de personnes qui partagent mes opinions ou convictions, ce qui les conduit bien souvent à me placer à la droite de la droite, conservatrice, identitaire, patriotique, hermétique à la diversité, bigote, attachée à une France bourgeoise, tout autant de qualificatifs qui devraient me rendre infréquentable à leurs yeux, mais il faut croire que cela doit rester au stade de leurs fantasmes projetés ou ne se traduit nullement dans mon comportement, car en dehors de franches conversations plus ou moins musclées, il y a peu d’impacts dans nos relations profondes.

Je finirais presque par me demander au fond ce qui me conduit à nourrir mes impressions immédiates sur le monde qui m’entoure par de telles lectures, tant ceux qui les partagent sont à mes yeux souvent infréquentables dans la vie quotidienne, mais je ne peux cependant m’empêcher de me dire qu’intellectuellement ils ont raison.

Sauf que moi j’aime les intellos, mais les intellos humains, rigolos et surtout avec du cœur.

Loin de moi l’idée de faire ce procès d’intention à Damien Le Guay que je ne connais pas personnellement et qui est certainement charmant. D’autant qu’il nous propose de surcroit ici un essai lucide, éclairé, étayé, en nous proposant des pistes de réflexion et des solutions pour renverser ce constat d’un pays qui se meurt de l’intérieur.

Mais franchement, même si ce livre m’a été recommandée, je frise en le refermant la mélancolie a un stade avancé.

Que nous dit-il de notre société ? Damien Le Guay dénonce le fait que depuis trente ans, nous enseignons les raisons d’une détestation légitime plutôt qu’une adhésion nécessaire à la cohésion nationale (…), et que notre modèle culturel est devenu un lieu d’hostilité réciproque, de détestations transmises et de discriminations justifiées par des micro-comportements de rejet identitaire qui reproduisent les relations entre « dominants » et « dominés », entre « colons » et « indigènes, entre « hétérosexuels dominants » et « sexualités dominés ».

Que faire selon Damien Le Guay ? Promouvoir de nouveaux mots d’ordre : donner, recevoir et rendre, trois dispositions d’esprit au fondement de toute relation humaine, et reprendre son destin en mains en détricotant le démontage anthropologique, et l’antiracisme radical qui, tous deux, légitiment la guerre civile des consciences individuelles.

Que rétorquer à tout ceci ? ses sources sont nombreuses, il suffit d’ouvrir un journal ou de regarder la télé pour lire ou entendre qu’intellectuellement il est loin d’être à côté de la plaque. Il ne va même pas assez loin à mon goût en omettant me semble-t-il le grand fléau de l’ultra-libéralisme qui directement ou indirectement alimente à mon sens la situation globale dans laquelle nous nous situons aujourd’hui, car tout est lié, et si fracture il y a, elle se situe également dans ce domaine, et le combat culturel ne peut se dispenser d’un combat sociétal et financier.

Je crois juste que j’aurais préféré me dire en terminant son livre qu’il a tort et être doté d’un esprit plus critique pour pouvoir apporter d’autres pistes de réflexion qui rendraient cet essai source d’un peu plus d’espérance et d’enthousiasme sur le monde dans lequel nous vivons.

Je me contenterai donc simplement à mon humble niveau de reprendre à mon compte et de vivre les quatre piliers que défend Bertrand Vergely dans son livre « Traité de résistance pour le monde qui vient » dans lequel il dénonce un exercice inédit du pouvoir actuel alliant à la fois une quête capitaliste du pouvoir économique grâce au profit et une quête communiste du pouvoir politique grâce au sens du « pour tous », un pouvoir post-totalitaire mélangeant consommation et idéologie qui paralyse les consciences en étouffant la pensée.

Si nous voulons réagir, il convient de :

–          se lever,

–          ouvrir les yeux,

–          vivre pour la vérité

–          se préparer à ce qui vient.

 

 

 

 

 

 

 

 

Damien Le Guay, né en 1961, est collaborateur du Figaro, essayiste et philosophe, vice-président du Comité national d’éthique du funéraire.

3 réponses
  1. Damien Le Guay
    Damien Le Guay dit :

    Merci pour votre lecture et vos appréciations qui, espérons-le, vous empêcheront d’aller vous pendre. Dernière de mes envies. J’essaie, tâche difficile, d’être lucide et de l’être pour tout le monde, pour mieux se retrouver ensemble, unis, forts contre l’adversité. A vous

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  2. Dom-Dom
    Dom-Dom dit :

    On ne choisit ni qui on est, ni où on naît, pas davantage l’époque où l’on vit.
    Il faut fleurir hic et nunc. La Providence a choisi pour nous:
    Bonum hic esse.

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  3. Hugues
    Hugues dit :

    Magnifique billet ou se mélangent questionnement humour et doute. À force de parler de déclin certaines choses s’auto realisent. Et si on essayait d’être heureux comme le dit Jacques Prevert…

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