Le Perlimpinpin

Tout récemment, mes enfants m’ont remis en mémoire ces mots savoureux prononcés par Emmanuel Macron lors du débat présidentiel qui l’opposait à Marine Le Pen où, docte et imperturbable, le pouce rejoignant l’index et les trois autres doigts pointés vers l’avant, ce dernier la regarda dans la yeux en lui disant : Madame le Pen, votre programme c’est de la poudre de perlimpinpin !

Cette phrase a tourné en boucle dans des clips remixés, découverts cet été par mes enfants, et comme ils sont encore à un âge où ils se lassent malheureusement difficilement de ce genre de plaisir, j’ai du perlimpinpin plein les oreilles.

A bien y réfléchir cependant, cette expression, à la sonorité rigolote et désuète, est juste incroyable surtout quand elle émane de notre président.

Pour ceux qui l’ignoreraient, de la poudre de perlimpinpin c’est de la poudre aux yeux dont on espère des vertus merveilleuses. Il y a donc de quoi se gausser au point de s’étouffer avec sa glotte.

Mais appliquons en politique ce qui nous est demandé pour les déclarations du pape : bienveillance et bonne foi et n’allons pas trop vite en besogne. Eclairons ses propos à l’aune de ses autres déclarations pour en comprendre et déceler la substantifique moelle, la quintessence du génie dont humblement il est possible, voire autorisé, d’être passé à côté.

Admettons que Jupiter n’apprécie pas la poudre de perlimpinpin, frein indubitable pour marcher ou plutôt courir au sein d’une époque où nous nous devons d’être efficaces sous peine de rester dans cette France périphérique totalement oubliée décrite par Christophe Guilluy.

Il ne le cache pas d’ailleurs. Il aime « ceux qui réussissent ».

Admettons. Après tout, il est libre de porter ses admirations sur qui il veut et ce serait mesquin de jalouser ou freiner les réussites personnelles dont nous devons nous réjouir.

Mais aux distillateurs de poudre de perlimpinpin, il nous faut également rajouter « ceux qui ne sont rien dans les gares » et « ceux qui ne travaillent pas assez pour se payer un costard ». Sachant que le chiffre de ceux qui vivent en dessous du seuil de pauvreté en France ne cesse de croitre, cela fait déjà un paquet de monde.

Comme il ne veut rien céder non plus «ni aux fainéants, ni aux cyniques, ni aux extrêmes », auxquels il aurait même rajouté « les égoïstes et les pessimistes », si on exclut les béats et les ravis de la crèche, pour être honnête, il ne reste quasiment plus personne !

Je me serais pour ma part casée dans le camp des caustiques, mais comme il n’existe pas, je me suis rattachée à celui des cyniques.

A se demander si, pour rendre hommage à Robert Escarpit et ses contes de la Saint Glinglin, notre président ne serait pas un Père Limpinpin qui s’ignore gouvernant des Perlimpinpins en puissance au pays de Merlin l’Enchanteur.

Céline aurait parlé de troufignololeries pour évoquer cet art de communiquer, ce qui n’en est pas moins truculent et jubilatoire, mais n’est pas Céline qui veut.

Allez ! un petit effort Monsieur le Président.

Vous souhaitez rassembler, vous devriez y arriver à parler aux Français, faites semblant au moins.

Car comme qui dirait : vive les Perlimpinpins !

3 réponses
  1. Hugues
    Hugues dit :

    Tu excelles ( aussi) dans le pamphlet. J’esquisse un large sourire réprobateur à sa lecture ne partageant pas toujours certaines de tes idées politiques, societales, cultuelles, culturelles, de mode, de mode de vie, décoration et jardinage. Mais, mais j’adore et je t’adore.

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