La voix contagieuse de François Cassingena-Trévedy
« Au vrai, prêcher sur l’Evangile est un acte redoutable. (…) Avec le temps, un irrépressible mouvement de réticence finit par prendre le dessus, et la conscience aigüe que le silence seul, alors, serait de mise, inspire l’horreur de maints bavardages dont on pourrait se rendre coupable devant les hommes et devant Dieu. (…) Nous parlerons, malgré tout, parce que nous sommes naturellement des hommes-de- parole, (…), parce que la Parole elle-même nous y invite, jusqu’à nous laisser cette recommandation en testament pascal : Prêchez à toute la création, (…) avec un seul office : celui d’éveiller à l’évènement de la Parole. (…) Il ne peut le faire, bien sûr, que s’il en est le témoin et, s’il se peut dire, le locataire. »
Homélies
Mon cher Papa,
J’ai reçu ce livre dont j’ai lu plusieurs extraits, épars et à des moments variés de la journée. J’ai l’impression d’y être hermétique, ce qui me chagrine profondément, ayant le sentiment d’avoir entre les mains un trésor et ne pas savoir comment le découvrir et l’apprécier à sa juste valeur. « C’est assez de joie, pour la voix qui l’explore et la balbutie, que de se savoir contagieuse » écrit le Père François à la fin de son prologue.
J’aurais aimé être pourvue de la même contagion pour parler de ce livre à l’écriture si belle mais je ne sais si ces homélies auraient plus de force à être données en chaire ou si elles doivent simplement se méditer. Je me permets donc de t’envoyer ce livre et me dire ce que tu en penses.
Ma Fillotte,
Voilà un bien bel ouvrage et je me réjouis que de tels livres soignés avec de si belles couvertures soient édités de nos jours. Je me réjouis davantage encore de constater que si de tels livres sont publiés c’est qu’ils doivent trouver leurs lecteurs, l’homélie étant en effet un genre littéraire et spirituel à part entière, dont l’exercice peut d’avérer délicat et périlleux.
Des paroles pour ouvrir à la Parole, tel est le sens de l’homélie.
Forme et contenu seraient pourtant bien faibles, bien insuffisants pour ouvrir le cœur de celui qui écoute, si l’Esprit ne venait lui-même remplir ce cœur en attente. Toutefois l’Esprit passe à travers les paroles de l’orateur en sa mission d’Eglise.
En méditant les textes qui nous sont donnés à chaque liturgie eucharistique, François Cassingena-Trévedy compose ses homélies à la manière d’un artiste. Le pasteur donne vie à la Grâce, invite à la méditation, seuil de l’oraison.
La Parole est dite, les paroles viennent, s’affirment, entrent peu à peu pour nourrir l’oraison. François Cassingena-Trévedy, avec ses propres mots, fait résonner le texte évangélique, le porte pour le mieux donner, pour éclairer la route, pour manifester l’essentiel.
Donner des paroles sur la Parole conduit vers la contemplation ultime de Celui qui se donne à voir et à aimer.
Il reste à écouter – ou à lire -, seul ou à plusieurs voix ; l’écho des paroles renvoie sans cesse vers la Parole suivant un cycle toujours recommencé.
A la manière d’une broderie, chaque homélie mêle tour à tour des figures bibliques, de pieux enseignements ou de simples observations pour notre temps, formant ainsi des figures rassemblées et solidement accrochées par les fils des paroles prononcées.
Chacun, suivant ses propres attentions, trouvera dans ce précieux décor la voie qui s’ouvre à lui et pour lui. Rien n’est vraiment fixé ; plutôt une invitation, une envolée vers le Tout Autre, si proche et si lointain à la fois, qui nous accompagne et nous attire toujours plus haut, au sein du Père. La Parole n’est plus alors que silence, mais un silence habité et lumineux, qui retentit au plus profond de l’être.
Je t’embrasse, ton papa
Né en 1959, moine bénédictin au monastère de Ligugé où il cumule les activités de maître de chœur et d’émailleur sur cuivre, François Cassingena-Trévedy, ancien élève de l’ENS et enseignant à l’Institut catholique de Paris, est aussi, en ses temps de permission, familier des grands espaces. Il est reconnu comme l’un des plus grands écrivains catholiques de notre époque. La voix contagieuse est sorti en septembre 2017.
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