Le droit hiérosolymitain dans l’Orient latin du XIè au XVIè siècle de Louis-Marie Audrerie

Les Assises de Jérusalem

« La venue des Francs en Orient fait suite à cinq siècles de pression hégémonique de l’islam naissant mais surtout à l’appel des papes à la délivrance des Lieux Saints. L’unique désir, alors exprimé, était de porter secours aux chrétiens d’Orient, population encore très largement majoritaire, et de délivrer le Saint Sépulcre menacé. (…) Les territoires délivrés étaient la récompense de tous les pèlerins armés, un véritable bien commun, et celui des chrétiens d’Orient et des Syriens. Ainsi, en parallèle de l’organisation féodale, assurant la première barrière militaire, s’est adjointe une organisation des cités, indépendantes de la féodalité, où se sont installés les hommes libres. pour établir cet état de fait, il semble en tout état de cause, que le droit opposable à une si grande diversité de personnes fut bien mis par écrit dans des chartes et approuvés par tous. Ce droit des premiers temps était alors (…) les Assises. « 

Il est heureux que de jeunes étudiants en histoire du droit, dotés de cet esprit de curiosité et de rigueur qui leur permet d’endurer pendant des années une vie quasi monacale d’archiviste et d’analyste, prennent encore un immense plaisir à emprunter les chemins de traverse qui les conduisent vers des voies encore inexplorées ou si peu, pour en faire l’objet de leur thèse. Et il est encore plus heureux que des éditeurs acceptent de les publier afin de porter à la connaissance du grand public tant de richesses à la fois juridiques et historiques.

Tel est le cas ici avec ce livre, à la fois dense mais très accessible, portant sur ce qu’il est courant d’appeler « Les Assises de Jérusalem », à savoir l’ensemble des Livres de droit rédigés pour l’essentiel au XIIIè siècle dans le royaume latin de Jérusalem par des jurisconsultes chevaliers de l’Orient latin.

A l’origine, ces normes de droit ont été établies en assemblée sous Godefroy de Bouillon, puis consignées dans des chartes malheureusement égarées lors de la perte de Jérusalem en 1187. Ces « assises et bons us et bones costumes dou royaume de Jerusalem », mises par écrit un siècle plus tard, forment le droit hiérosolymitain qui, sans rupture, devint la coutume partagée au royaume latin de Jérusalem reconstitué à Saint Jean d’Acre et celle du royaume latin de Chypre, et ce, jusqu’à ce que l’île passe sous domination ottomane en 1571, marquant ainsi la fin de l’histoire de l’Orient latin.

Ce droit, vivant, évolutif, s’inscrit et ne peut se comprendre qu’au sein d’une histoire dense et passionnante, qui en explique à la fois les sources mais également son cadre. Les croisades qui se sont succédées en vue de délivrer les Lieux Saints justifient la nécessité de mettre rapidement en place de nouvelles institutions à travers lesquelles, le lecteur contemporain que nous sommes, peut entrevoir une société se dessiner et des mœurs s’encadrer. Ces institutions sont certes transposées pour partie mais ont tenu compte des réalités rencontrées, et notamment de la délivrance du joug musulman et de la présence de chrétiens d’Orient.

Aussi, l’histoire du droit latin hiérosolymitain coïncide-t-elle avec l’histoire de l’Orient latin. Partir à sa découverte en suivant le chemin tracé par l’auteur de cette thèse, c’est aussi s’immerger pleinement dans six siècles d’histoire étroitement mêlée à celle de notre pays, qui ont vu naître tant de grands noms.

2 réponses
  1. Dom-Dom
    Dom-Dom dit :

    Cette terre où le Christ a vécu, est mort et a ressuscité; Terre bénie et pourtant, combien de guerres, de massacres et plus encore. Les vents mauvais se sont aujourd’hui, comme hier ou demain, déchainés. La Terre promise est toujours à venir.
    Les Francs ont, pour un temps, cherché à maintenir et, malgré des difficultés presque inhumaines, réussi à former un royaume avec ses lois et ses usages, avec des personnes soumises à leurs richesses et leurs pauvretés.
    Il reste à maintenir, toujours et encore, car cette Terre est celle du Sauveur, pour tous et pour chacun.
    DA

    Répondre
  2. ht
    ht dit :

    L’érudition de certains nourrit en moi un sentiment assez pénible d’absence de culture.
    Pour connaître personnellement l’auteur de cette thèse je peux affirmer que sa culture ne se limite pas à ce seul sujet…
    Avec respect et humilité

    Répondre

Répondre

Se joindre à la discussion ?
Vous êtes libre de contribuer !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *