Gazette culturelle de février

Gazette culturelle de février

Que lire, que voir, qu’écouter en février, quand le temps est gris, froid et que la neige, qui n’est poétique qu’en vers, est l’occasion de vous retrouver les quatre fers en l’air sur des trottoirs glissants ? Là tout de suite j’entends déjà les noooon, c’est super chouette la neige, les bonhommes de neige, la blancheur … oui au ski peut-être avec les bonnes chaussures, le manteau qui tient chaud … etc etc … et encore … Dans la vraie vie de tous les jours, avec de la neige sur les trottoirs, vous marchez à petits pas de chinois, la tête baissée pour éviter de vous péter la figure, le bras en l’air avec un parapluie pour tenter de limiter l’afflux de flocons qui se glissent dans, sous, à travers votre écharpe et vous faites des « oups » à intervalles réguliers quand votre pied dérape et que vous vous rattrapez de justesse (ou pas).

Vous cherchez désespérément des paires de bottes pour vos gamins au fin fond de l’armoire, celles que vous gardez « au cas où… », pour finir par vous apercevoir avec désespoir qu’elles sont trop petites de deux pointures mais que leurs chaussures sont tellement trempées qu’il n’y a pas d’autre solution que de leur enfiler de force au chausse-pied en recroquevillant les orteils. Les gants qui gisent dans un panier de l’entrée ont la même manie curieuse et exaspérante que leurs copines les chaussettes, ils finissent toujours en exemplaire unique et vous retournez ciel et terre pour retrouver le jumeau ou la jumelle en maugréant. Que vous viviez dans une maison de 200 m² ou un petit appartement où les coins pour se cacher restent limités, il demeure un grand mystère que celui de ces gants et chaussettes qui n’ont de cesse de vouloir vivre seuls alors qu’ils n’échappent à la poubelle que lorsqu’ils restent unis. Parabole ?

L’hiver qui précède le printemps, c’est un peu comme le Carême avant Pâques : l’attente de la Résurrection, de la Renaissance, du renouveau. C’est savoir qu’il existe du chocolat, feuilleter un livre d’images, presque sentir l’odeur se dégager de ses pages, mais recevoir un petit coup sur les doigts en essayant d’en dérober un. Il nous faut donc saisir son mal en patience, et prendre sur soi en silence. En fermant les yeux, je pourrais presque sentir la bise légère du soir qui se faufile par la fenêtre entrouverte en soulevant délicatement le rideau. En les ouvrant, ah non, je confirme, ce n’est pas encore cela.

Il reste donc …

Les livres

Sainte Rita de Cascia de Marie Allain

Une amie en début d’année m’a proposé d’aller sur un site internet qui vous attribue un saint de façon aléatoire ou providentielle (tout dépend du point de vue) pour l’année. J’ai joué le jeu, je suis allée sur le site, et je suis tombée sur Sainte Rita, grande avocate des causes désespérées. Histoire de ne pas faire les choses à moitié, j’ai poussé l’exploit jusqu’à lire sa biographie. Grande Sainte populaire, elle est souvent invoquée pour des causes perdues, mais sa vie personnelle m’était moins familière. Je découvre dans ce livre, une femme plutôt malheureuse en mariage, qui perdra successivement son mari puis ses deux enfants, et entrera par la suite chez les sœurs augustines. Elle reçoit le signe de son union mystique au Christ par un stigmate au front qu’elle portera durant quinze ans. De sa cellule, puis après sa mort, elle opèrera de nombreuses guérisons et elle restera invoquée le plus souvent pour redonner espoir à ceux et celles sur le point de le perdre.

Sainte Rita a désormais rejoint la litanie des saints que nous invoquons le soir à la prière en famille : nous la prions pour les Chrétiens d’Orient, mais je me la garde au chaud pour des causes plus personnelles, et il me faut avouer qu’effectivement elle intervient de façon spectaculaire.

Un livre que j’encourage à lire vivement.

Le jour d’avant de Sorj Chalandon

Journaliste de nombreuses années à Libération, c’est cependant en tant qu’écrivain que Sorj Chalandon s’est révélé à ma pomme avec un énorme coup de cœur pour ses romans Mon traître (2008) et Retour à Killybegs (2011 – grand prix du roman de l’Académie française), qui se situent en Irlande du Nord. En 2017, il nous revient avec un splendide roman autour de la catastrophe minière de Liévin-Lens qui a fait 42 morts le 27 décembre 1974. Ecriture incisive et percutante, souci du détail dans un langage qui reste malgré tout sobre, le milieu de la mine du nord de la France se dessine sous nos yeux et nous happe immédiatement. Du Zola mais dans les années 70 qui marquera une région, des familles, des hommes. Une histoire qui nous tient en haleine et dont la chute est totalement inattendue. Un livre idéal à la flambée.

Guide catho pour éviter les catas…. de Lulu Saint Régis

Qu’y a-t-il de plus délicieux que de se plonger dans un livre des bonnes manières et de s’arrêter sur quelques paragraphes au gré des pages feuilletées ? Les livres d’autrefois ont le charme désuet des périodes désormais révolues, mais certaines règles de savoir-vivre perdurent et il est toujours bon de s’y replonger de temps à autre. Le savoir-vivre c’est aussi un savoir-être, une façon de se poser en société, une courtoisie vie à vis de l’autre, et lorsqu’une femme aussi remarquable que Lulu Saint Régis (qui n’est autre d’ailleurs, sous ce pseudo, que ma belle-sœur chérie), prête sa plume bienveillante et pleine d’humour à cet exercice en 2017, il serait dommage de se priver de sa lecture.

A noter pour les connaisseurs que ce livre figure dans la collection des fameuses anti-sèches cathos d’Edmond Prochain.

Ne boudez pas votre plaisir sans vous arrêtez sur le titre qui peut être trompeur … du tout public.

Devance tous les adieux d’Ivy Edelstein

Préfacé par Christian Bobin, voici une petite pépite à vous arracher les larmes aux yeux d’émotion et de tendresse. Un court texte qui raconte, trente ans après les faits, le suicide d’un père. « Mon père a aimé ma mère comme un enfant perdu. Un matin, elle a décidé de ne plus partager sa vie et elle a quitté la maison dans un grand soupir de soulagement, nous laissant seuls avec lui. Il avait quarante-huit ans. Quelques mois plus tard, il avait cent ans. » Point de pathos dans ce récit, mais des phrases jetées sur le papier, quelques aphorismes et la puissance de l’amour qui tisse un cercueil d’immortalité à un père parti trop vite. « Le suicide est une conversion forcenée à Dieu. C’est un flocon de neige qui remonte en boule de feu vers son nuage. »

Un premier livre pour cet auteur, sorti en 2015.

 

Le théâtre

Une leçon d’histoire de France de et par Maxime d’Aboville

J’ai imaginé de faire une leçon d’histoire avec l’idée, plutôt que d’écrire moi-même ou d’improviser un cours qui aurait manqué d’envergure et de souffle, de composer cette leçon à partir d’extraits de grandes œuvres de notre littérature historique. Pour faire vivre sur scène cette épopée, qui tient plus du grand récit mythologique que du cours d’histoire scientifique, je me suis amusé à tenir le rôle de l’instituteur d’autrefois, avec sa blouse grise et sa grande carte de France, comme on en voyait jadis dans toutes les salles de classe. Maxime D’ABOVILLE

Nous retrouvons tout le talent et la maestria de Maxime d’Aboville qui excelle dans ce rôle d’instituteur, amoureux de l’histoire et amoureux de la France. A regarder en famille.

C’est en ce moment au Théâtre de poche.

La musique

Nina Simone

Un bijou de sensualité que cet album écouté en boucle depuis des années et de nouveau en ce moment. Il est remonté sur la pile et n’en descend plus.

1 réponse
  1. Gustave
    Gustave dit :

    Les 4 saisons de Debord? Musicalité, délicatesse éclectisme, ces billets sont à l’écriture ce que Vivaldi est à la musique. Une joie de retrouver l’humour hivernal de notre précieuse Elvire

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